On sait peu de choses sur ce train sans rails ou sur roues fabriqué à Indianapolis et qui a fait le tour du monde. Deux firmes cinématographiques, la Gaumont française et la Metro-Goldwyn américaine souhaitaient faire valoir leur puissance commune en faisant la promotion du film Ben-Hur, sorti en 1925.
Ce tour unique en son genre commence en mars 1925 aux États-Unis. Le train est ensuite exhibé au Mexique et au Canada avant de traverser l’Atlantique et d’accoster en Europe à Rotterdam. Il s’arrête dans 67 villes hollandaises et continue son show au Danemark, au Luxembourg, dans 53 villes de Belgique, en Allemagne et dans 157 villes en Angleterre, en Ecosse et au Pays de Galles.
Il aborde la France le 24 novembre 1926 par Strasbourg après déjà 100 000 km de trajet. Il lui en reste environ 350 000 à faire à travers l’Europe, l’Afrique et l’Asie dont 10 000 en France. Son livre d’or est signé par les plus hautes personnalités comme le roi et la reine des Belges, le lord-maire de Londres, le préfet de la Seine qui n’hésitent pas à participer aux cérémonies de réception.
Il est composé d’une locomotive style Compound avec deux moteurs de 90 chevaux, d’un tender et d’un wagon Pullmann. Le freinage hydraulique est à main et à pied. Ce wagon est à la fois un salon, une salle-à-manger, un fumoir et wagon-lit car les sièges se transforment en couchettes. Une « radio-table » permet de capter la station de la Tour Eiffel et celle de Londres. L’ensemble est chauffé et ventilé à l’électricité. La cuisine fonctionne aussi à l’électricité. On y bénéfice de l’eau chaude et froide. A l’arrière du wagon, des chaises longues et des fauteuils placés sur une plate-forme aménagée permettent de profiter du paysage.
Profitent de ce long voyage messieurs Carrier, directeur, Parsons, ingénieur en chef, Lazare Edelsten de la maison Gaumont-Metro-Goldwyn, Rush, mécanicien et plusieurs chauffeurs.
Moulins qui n’est pas sur l’itinéraire programmé aura quand même le bonheur de voir arriver le convoi. En effet, les décideurs de la Gaumont tiennent à remercier la population qui a toujours bien accueilli ses productions.
C’est ainsi que le samedi 8 janvier 1927 peu après 14h 30, le train à vapeur, précédé et suivi de deux voitures Ford, suit l’avenue de la gare jusqu’au Palace-cinéma où la direction (messieurs Juste et Renou) a préparé un champagne d’honneur qui réunit, en plus des voyageurs, René Boudet, maire, messieurs Clermont et Gervy, conseillers municipaux. Monsieur le préfet, indisponible, s’est excusé. La deuxième étape est l’Artistic-cinéma, place Garibaldi, où monsieur Guillaume, directeur, s’est fait un devoir d’offrir aussi le champagne à ces messieurs. Avant d’être garé au garage Renault rue de Lyon où il peut être visité le lendemain matin, le train passe par les rues les plus importantes de la ville où les curieux ne manquent pas. Son périple le conduira à Nevers et Bourges les jours suivants. La dépense quotidienne est évaluée à 12 000 francs (7 360 euros actuels d’après le convertisseur de l’Insee).
Louis Delallier