Les journaux sont remplis de la guerre qui sévit depuis plus de deux ans et demi. Les gros titres passent des fronts italien, allemand, russe aux démarches pour la paix, puis aux déclarations des uns et des autres et aux supputations sur l’évolution de la situation, tandis que les pages locales égrènent les morts pour la Patrie, les citations au tableau d’honneur, les mouvements de réfugiés, le passage des trains de blessés, de prisonniers, les restrictions. Ça n’en finit pas et il faut quand même tenir contre vents et marées.
C’est sans doute cet espoir d’un avenir plus serein qui conduit Gabrielle Blanc et Laurent Francon à se marier en ce jeudi nuageux et frais du 1er mars 1917. Elle est infirmière-major et lui sergent au 333e régiment d’infanterie. Comme il est intransportable (certificat d’Édouard Margnat médecin-chef de l’hôpital temporaire n°21*), le premier adjoint au maire de Moulins, Joseph Carnel et le chanoine Larras, curé de Saint-Pierre font le déplacement au 15 de la rue Bourau-Frères. Les cérémonies civile et religieuse se déroulent en présence de l’état-major des lieux. Quatre témoins signent les registres :
Alexis Braud, 38 ans, employé de chemin de fer à Moulins
Joseph-Noël Butin, 77 ans, retraité à Moulins
Henri Sauvage, 42 ans, avocat à Alès (Gard)
Édouard Margnat, 43 ans, médecin-chef (qui deviendra médecin consultant à Vichy, où il décède le3 décembre 1930, et membre du collège Royal des chirurgiens de Londres).
Laurent (27 décembre 1890 Lyon - 6 octobre 1945 Villeurbanne) est admis à la pension de retraite le 16 mai 1918 pour une invalidité permanente de 60 %. Il a été blessé au genou par un éclat d’obus, le 8 septembre 1916, aux avant-postes de Verdun qui ont subi un violent bombardement. Cité à l’ordre du mérite, il est titulaire de la Croix de guerre avec étoile d’argent et de la médaille militaire (reçue le 2 février 1918). Ce sous-officier de valeur s’est « distingué par son intelligence et son sang-froid ». Il était employé de commerce avant sa mobilisation.
Gabrielle est née dans le Var, à Toulon-sur-Mer, le 25 juin 1891, d’un père boulanger reconverti dans la marine. Elle demeurait rue Baudin, à proximité du lycée, au moment de ses noces. Elle décède le 1er avril 1973 dans le 2e arrondissement de Lyon.
Le 1er mars, l’American-cinéma, cours de Russie (actuel cours Anatole-France) propose aux amateurs Le cirque de la mort, film d’Alfred Lind sorti en 1916 avec Hamilton Revelle (1867-1958), Emmo Semori, Rita Jolivet (1884-1971). Le sujet n'est pas des plus riants :
Une jeune fille et un prince tombent amoureux et décident de s’enfuir. C’est sans compter sur la mort du père du prince qui doit monter sur le trône. Il est également obligé d’épouser une femme de sang royal. La jeune abandonnée tente de se suicider. Le prince découvre qu’elle n’est pas morte quand elle sauve son bébé prisonnier d’un chimpanzé de cirque fou.
Louis Delallier
* Lycée de jeunes filles aujourd'hui collège Anne-de-Beaujeu, 26 rue du 8-Mai actuelle, .