En 1926, le rédacteur en chef du Progrès de l’Allier reçoit une lettre élogieuse sur la ville de Moulins écrite par Henri Lavedan de l’Académie française, lettre dont il me plaît de vous communiquer un extrait.
« C’est une charmante ville que Moulins. Je l’ai parcourue plusieurs fois et à chaque rencontre avec elle, nous avons renoué le plus agréablement et le plus nonchalamment du monde, comme entre de vieilles connaissances. Mieux : comme entre des sensibilités analogues.
Moulins me parut toujours plus proche de Paris que certaines autres villes situées bien près de l’Ile-de-France. Cela tient sans doute à cet air élégant de vieille capitale que résument les ferronneries de vos balcons, la majesté de vos façades, l’aisance mémorable de vos ducs, le souvenir de passages royaux.
J’ai retrouvé, dans la rue de Decize, dans la rue de Bourgogne, cette atmosphère de vie calme, sure du lendemain toute pénétrée de considération héritée et maintenue, sans laquelle l’unité de notre patrie ne se serait pas faite puisque, aux heures de délabrement national, elle n’aurait pas pu se refaire.
Il n’y a pas de cité imposante sans un cours d’eau digne d’elle. L’Allier assure à Moulins des perspectives qui laissent pressentir la Loire de nos provinces de l’Ouest sans que le débit de la rivière et l’enjambement de son pont soient indignes des aspects d’un grand fleuve.
Si j’étais Moulinois je serais, je le crois, très fier de mon pays natal. Et les Moulinois me semblent l’être insuffisamment. Est-ce parce que leurs deux plus célèbres compatriotes, Villars et Banville, n’y sont nés que fortuitement ? Est-ce parce que l’accoutumance d’horizons quiets et faciles d’accès abolit l’orgueil local dans le cœur des hommes ? En tout cas, mon amour de la France et de ses patrimoines s’est accru à mes passages dans la capitale du Bourbonnais, devant le tombeau du duc de Montmorency comme le pavillon Anne de Beaujeu. »
Henri Lavedan (Orléans 1859 - Paris 1940) est journaliste et auteur dramatique, élu à l’Académie française en décembre 1898. Il travaille pour Le Figaro, Gil Blas, L’Echo de Paris. En 1890, il commence à écrire des comédies pour le théâtre. L’une de ses pièces « L’assassinat du Duc de Guise » est portée à l’écran en 1908 par André Calmettes et Charles Le Bargy.
Louis Delallier