Entre le bœuf et l’âne gris du XVIe siècle, qui serait le plus ancien cantique à nous être parvenu, Jésus que ma joie demeure, Douce nuit ou encore Petit papa Noël en 1944 ne sont que quelques exemples musicalement bien différents et représentatifs de la tradition des chants de Noël qui remonte à la Nativité comme il se doit. Les premiers auraient été chantés par des anges au-dessus de la crèche où dormait l’enfant Jésus.
À Moulins, l’usage accordé aux petits garçons d’aller de porte en porte pour chanter des cantiques durant le mois précèdent Noël et faire une quête à se partager est supprimé par la municipalité le 28 novembre 1811. Il s’agit de mettre fin aux disputes, voire aux bagarres qui ne sont pas rares entre les jeunes chanteurs des différents quartiers.
Mais la coutume a la vie dure et resurgit à la fin du 1er Empire en 1815. Le cantique étant différent chaque soir du mois, il faut un répertoire abondant puisé dans des recueils spécifiques imprimés à Dijon. Il existe toutefois des chants typiquement bourbonnais qu’on juge naïfs et moins poétiques. La Revue bourbonnaise de 1886 rapporte que ce sont les enfants les « mieux famés des faubourgs » qui déambulent en ville sous surveillance policière. Le jour de Noël, ils quémandent dans chaque maison une récompense qu’ils estiment méritée pour avoir battu le pavé malgré le froid, la pluie ou la neige. Ils reçoivent des bûches de bois, du pain ou un peu d’argent qu’ils dépensent en buvant un coup tous ensemble.
Malheureusement, la nature humaine ne se refait pas et les désaccords continuent malgré le renouvellement des générations et conduisent Pierre Dupoyet, maire de Moulins à interdire, à son tour, ces manifestations pourtant appréciées des habitants. Nous sommes en 1866.
A la fin du mois de mai 1891, la croix érigée à l’angle de la rue Sainte-Catherine et de celle des Potiers est descellée, renversée et jetée sur la voie publique de nuit et pour la seconde fois C’est l’occasion pour le quotidien la Croix de l’Allier de rappeler l’importance de cette croix pour les catholiques. En effet, devant elle sont passés pendant des siècles les cercueils qu’on transportait au cimetière des Choux (voir mon article à son sujet). Et à son pied, la population est venue s’agenouiller, elle aussi dans le froid et la neige, et chanter le poème de la Passion à 20 heures. Le journal regrette encore l’arrêté de M. Dupoyet qui a aussi mis fin à ces pratiques religieuses.
La Croix de l’Allier termine par cette phrase : « Triste génération que celle qui insulte ce que nos pères respectaient : que Dieu lui épargne le châtiment qu’elle mérite ! »
Joyeux Noël !
Louis Delallier