La société des bains-douches moulinoise est créée le 9 août 1910. Elle est composée de nombreuses personnalités locales.
Président : M. Bonnot président de l’Union des sociétés de secours mutuels de l’Allier
Vice-présidents : MM Milcent, président de l’Union bourbonnaise des habitations à bon marché - Vidard, vice-président de l’œuvre mutuelle des habitations ouvrières
Secrétaire : M. Ferrier, président de la Société de secours mutuels des agents des P.T.T
Secrétaire-adjoint : M. Jeanjean, directeur d’école, membre de la Société de secours mutuels des instituteurs de l’Allier
Trésorier : M. Carnel, vice-président de la société de gymnastique « La Bourbonnaise »
Trésorier-adjoint : M. Chonier, président de la Fraternelle des employés et ouvriers des chemins de fer et de l’Avenir du prolétariat »
Conseiller administratif : M. Advenier, notaire
Conseiller juridique : M. Chirol avocat
Conseiller hygiéniste : M. Bonnet, médecin
Administrateurs : MM Charpy, président de la chambre syndicale des entrepreneurs - Démanèche, secrétaire général de la Fédération des syndicats ouvriers
Son projet est d’installer à Moulins un lieu permettant à la population de se laver dans de bonnes conditions. Il est d’abord envisagé de louer à la ville, 10 francs par an, un immeuble de la rue du Pont-Ginguet. Mais, le 12 février 1912, le conseil d’administration de la Société décide de construire rue Paul-Bert un établissement dont les plans et les devis ont été approuvés par le ministre compétent. Les fonds proviennent d’une importante subvention d’État, d’une subvention de 35 000 francs de la Commission des jeux et de souscripteurs divers. Pour être membre fondateur, il faut verser 100 francs.
Jusque-là, il était possible d’utiliser les bains privés Chomet, repris par Madame veuve Vidard, qui occupent un emplacement compris entre la rue de Pont, rue de la Batterie et l'angle de la place d’Allier et de la rue Paul-Bert. La publicité fait valoir le large choix offert aux clients traités par un personnel expérimenté suivant rigoureusement les prescriptions des médecins et utilisant les eaux de la ville : Bains simples, complets et médicinaux, bains de vapeur et de sudation, douches froides, tempérées chaudes, ascendantes, écossaises ou alternées, douches locales et spéciales sous diverses pressions, frictions, massages ordinaires et médicinaux, pédicure, manucure.
Le 30 août 1912, M. Advenier vend à la Société des bains-douches (dont il fait partie...) un terrain lui appartenant à côté du temple protestant pour 17 000 francs. Un entrepreneur moulinois reçoit commande pour les travaux. L’Œuvre française d’hygiène de Paris qui possède une large expérience dans ce domaine en France est chargée de l’installation des équipements. L’établissement comprendra, au rez-de-chaussée, 18 cabines à douche que l’on annonce comme très confortables et très hygiéniques. Le public pourra prendre des douches chaudes, tièdes ou froides entre 0,20 francs et 0,25 francs.
Enfin, presque trois ans plus tard, le 14 juillet 1913 à 15 heures, les bains-douches moulinois sont inaugurés. M. Bonnot, président de l’œuvre moulinoise, rappelle que les bains-douches à bon marché ont été introduits en France par Frédéric Passy* de l’Institut. Il explique que cette œuvre de salubrité publique contribue à « la propreté et l’éducation morale des concitoyens ». Il invite la population à de fréquentes visites pour la familiariser avec « l’hydrothérapie populaire qui a reçu l’appellation et les encouragements des plus hautes sommités médicales ». Il compte ainsi obtenir « une génération robuste et du plus bel équilibre physique ». « Une attention toute spéciale sera apportée aux soins des enfants afin de leur inculquer les principes de propreté individuelle qui leur assureront la santé ». M. Bonnot est sûr que ces mêmes enfants qui auront goûté aux bains-douches y reviendront avec un empressement semblable à celui qu’ils mettent à aller jouer et que l’habitude de se laver deviendra pour eux une nécessité !
Toutes les personnalités du cru sont remerciées, que ce soit le préfet Linarès, les sénateurs de l’Allier ou l’administration de la caisse d’épargne de Moulins. M. Bafoil président de la Société française d’hygiène n’est pas oublié. Une coupe de champagne est offerte pour désaltérer les contributeurs avant une visite guidée des lieux.
Louis Delallier
* Frédéric Passy (1822-1912) est le fondateur de la Ligue de la Paix et de la Liberté le 21 mai 1867, de la Société d’arbitrage entre les nations en 1870, ancêtres de l’ONU. Il est élu député de la Seine en 1881 et 1885. Battu aux élections de 1889, il s'oppose à la politique colonialiste de Jules Ferry et reste dans les mémoires comme le député qui voulait interdire la guerre. Il est l'auteur d'une loi sur les accidents de travail, favorable aux ouvriers. Féministe avant l’heure, il est également favorable à l’abolition de la peine de mort. Le 10 décembre 1901, il reçoit avec le Suisse Henri Dunant, fondateur de la Croix-Rouge, le premier prix Nobel de la paix.