Le Comité des fêtes de la ville de Moulins fête les enfants en ce mois de janvier 1920. Il s’adresse particulièrement aux enfants de l’hospice général et des œuvres d’assistance pour lesquels la participation sera gratuite. Les inscriptions sont prises aux magasins du gaz, rue Paul-Bert, tous les jours de 14h à 18h. Il est recommandé aux adultes de ne pas venir en trop grand nombre, car les places manqueraient dans la salle du Pont-Ginguet (à l’arrière du Sacré-Cœur) chauffée pour l’occasion. Un roi et une reine seront tirés au sort et recevront de Monsieur le Maire chacun un livret de caisse d’épargne, dons du Comité des fêtes.
Le 11 janvier, tout est prêt pour un après-midi dédié aux enfants. Le Président du Comité des fêtes, Henry Bonnet, prononce son discours de présentation. Puis, en première partie, un bal est donné accompagné par un orchestre de musiciens bénévoles.
Jean, âgé de 10 ans, enfant abandonné confié à l’hôpital général et Anna, 9 ans, fille d’un ouvrier typographe deviennent le roi et la reine de la fête. Le roi choisit Monsieur Chatron, commerçant moulinois bien connu, comme ministre du ravitaillement. Pendant ce temps, les organisateurs distribuent des gâteaux, des friandises, des surprises, des bonbons, des oranges et des papillotes. Certaines papillotes contiennent un papier numéroté échangeable contre un cadeau ou un jouet provenant de lots non réclamés de la précédente tombola. Les commerçants participent également. On peut citer une paire de chaussures remise par la fabrique Blanchet et beaucoup de jouets offerts par Monsieur Mathiaux directeur des Nouvelles Galeries.
L’après-midi est prolongé par un cortège en ville, Lyre moulinoise en tête. La reine et le roi défilent dans une voiture fleurie par Monsieur Franchisseur, horticulteur moulinois auteur de la décoration de la salle. Les très nombreux enfants marchent quatre par quatre, de petits drapeaux tricolores et des thyrses fleuris à la main. Dans la mythologie grecque et romaine, le thyrse est un grand bâton orné de feuilles de lierre et surmonté d'une pomme de pin.
Les passants sont ravis d’assister à un défilé de ce type. Le soleil se montre enfin quand les enfants arrivent place de l’hôtel de ville remplie de spectateurs. Le roi et la reine sont installés dans des fauteuils en haut des escaliers et les autres enfants se groupent au pied des escaliers.
Le président du Comité des fêtes dans son allocution publique regrette avec humour de s’associer, malgré sa qualité de républicain de longue date, à une fête non démocratique. C’est pourquoi, par protestation, il a coiffé le roi d’un bonnet phrygien. Il rappelle la coutume des Ducs de Bourbon qui distribuaient des gâteaux aux enfants du peuple le jour de l’Epiphanie et prenaient à leur charge l’éducation du roi et de la reine.
Jean-Baptiste Buvat, maire de Moulins, prend à son tour la parole et remercie les organisateurs et le directeur de La lyre, Monsieur Belin. La jeune reine qui a la chance d'avoir des parents, invite le jeune roi à passer la soirée en famille. Pour certains, cette journée aura été une éclaircie dans une vie bien mal commencée.
Louis Delallier