Autrefois, au rond-point Georges Pompidou actuel, juste au milieu du cours de Bercy, il était une buvette très fréquentée par les cyclistes matinaux qui s’y reposaient ou soignaient quelque blessure avant de reprendre la route. Certains n’avaient pas besoin de bonne raison pour y entrer et « tuer le ver ». En été, les promeneurs en quête d’espace et d’ombre se désaltéraient volontiers chez « l’ermite du cours », de son vrai nom Barthélémy Bézulier. Les consommateurs y avaient pris leurs habitudes comme si rien ne pouvait changer. Seulement un jour de décembre 1893, la charmille est supprimée, les parterres détruits et la baraque rasée. Le vide en lieu et place de la convivialité.
Longtemps considéré comme le plus bel endroit de Moulins, le cours de Bercy* se dégrade rapidement après le départ de l’intendant. En 1695, les fermiers ensemencent dans sa totalité la terre de la grande allée qui va de la porte de Paris à la rivière contrairement aux conditions de leur bail. Malgré des dommages et intérêts qu’ils sont condamnés à verser, ils ne varient pas dans leurs pratiques. De plus, les crues de l’Allier ravinent le sol. Les maires qui se succèdent font leur possible pour y mettre bon ordre et y attirer la population. Ils ordonnent des améliorations comme la pose de bancs, l’interdiction d’entrer aux chevaux, voitures et bestiaux, interdiction mal respectée qui entraîne la fermeture des barrières même aux chevaux, voitures et bestiaux des riverains. Il leur est conseillé de poser un pont au-dessus du ruisseau de l’allée des Soupirs pour rentrer chez eux…
Le cours de Bercy a été le lieu de concerts pour les musiciens des régiments en garnison, de la revue des troupes pour la fête nationale, des loues des domestiques le 24 juin, des foires aux bovins, aux chevaux. Il a même été question d’y implanter une gare (la gare de Bercy !) pour faciliter et sécuriser l’embarquement des animaux qui doivent traverser toute la ville les jours de marché et de foire, soit plus de 2 km depuis la gare en évitant le centre. L’idée lancée en 1869 et reprise en 1907 ne verra jamais le jour.
Le cours de Bercy à Moulins est toujours heureusement planté de ses arbres anciens, mais sous lesquels les voitures en stationnement sont légion et sous lesquels la déambulation n'a plus rien de champêtre. En outre, une rue à la circulation automobile importante aux heures de pointe le traverse de bout en bout.
Dans un proche avenir, il sera prolongé d’un deuxième pont routier au-dessus de la rivière, jumeau contemporain de notre vénérable pont Régemortes.
Louis Delallier
*Du nom d’un intendant de la généralité de Moulins de 1683 à 1685.
Sources :
Henry Faure, histoire de Moulins tome 2, Moulins, Crépin-Leblond, 1900
Marcel Génermont, Vieilles rues, plaques neuves, Moulins, Crépin-Leblond, 1937
Courrier de l’Allier du 6 décembre 1893