Cette société, fondée le 30 mars 1888 par messieurs Fonlupt qui fut le premier président et Guillaumin, a comme ciment le sentiment commun de l’amour du pays et comme objectif la protection mutuelle, l’aide dans le malheur et la maladie, la défense des intérêts du pays natal.
Les conditions pour en faire partie se résument à être né en Bourbonnais ou avoir des parents nés dans le département ou encore y avoir vécu 12 années consécutives. Le droit d’admission en est de 2 francs auxquels il faut ajouter le droit des insignes et une cotisation annuelle d’un franc ou de 100 francs pour une adhésion perpétuelle. Les femmes y sont admises à titre gracieux. Les cotisations abondent une caisse spéciale d’aide en cas de coup dur. Le conseil d’administration se compose de 14 membres. En cas de décès d’un sociétaire, une délégation de 20 adhérents et de deux membres du conseil d’administration se rendent aux obsèques (10 membres pour un enfant).
Au cours du premier trimestre de chaque année, un grand banquet, suivi d’un bal, est organisé. L’ambiance musicale y est assurée par des vielleux et des cornemuseux qui font danser l’assistance jusque très tard dans la nuit. La bourrée bourbonnaise est à l’honneur naturellement. On se retrouve aussi pour diverses fêtes, dont la Saint-Hubert, des concerts, des soirées lyriques etc., toutes au profit de la caisse de secours.
Le premier anniversaire de la fondation de la société est célébré le samedi 16 mars 1889 dans le restaurant Corraza* au Palais-Royal. Aux côtés de Messieurs Fonlupt et André Cornil, on trouve Bernard-Honoré Préveraud et Alphonse Labussière, deux des six députés de l’Allier, Joseph-Achille Foussier (originaire de Moulins et négociant en vins boulevard du Temple), conseiller du département de la Seine, et Louis Ganne, compositeur, né à Buxières-les-Mines. Joseph Chantemille, sénateur, monsieur Druelle et Théodore de Banville sont excusés.
Les quelque 200 membres répertoriés en 1893-94** démontrent que ce besoin bien compréhensible de se regrouper entre « pays », de chercher un soutien en cas de difficultés, ou tout simplement de partager des souvenirs de lieux, de gens, d’évènements communs n’est pas une vue de l’esprit.
À ce moment-là, Étienne Pierre (9 rue Meslay), avocat à la cour d’appel, préside la société dont le siège social se trouve 54 rue de Cléry. Monsieur Lustrat et le docteur Meige en sont vice-présidents, Louis Guillaumin et monsieur Chenaud secrétaires, Charles Boudard, ancien président de la chambre syndicale des marchands de vin, et le docteur Barjon trésoriers.
En 1894, toujours en mars, le samedi 10, banquet et bal musette se déroulent dans les mêmes lieux et sont présidés par monsieur Dunan, professeur au lycée Louis-Le-Grand. Messieurs Étienne Pierre, président de la société, Charles Boudard, trésorier, Guillaumin, secrétaire, Charles Gidel proviseur du lycée Condorcet, Meige, ancien médecin principal des armées, Fonlupt président fondateur et Coudert, Beynet, Lustrat, Hervier membres du CA (de 1892 à 1894) sont présents. Charles Gidel fait preuve d’ouverture d’esprit en proposant de laisser la présidence du banquet de 1895 à une femme.
Il semble que cette idée ait fait long feu, car c’est Jean Coulon, le sculpteur, qui préside le banquet du samedi 16 mars 1895. Il est l’auteur, entre autres, de la statue de Banville, toujours présente dans le jardin de la gare, inaugurée quelques mois plus tard.
Le restaurant Corraza reste le lieu privilégié de la réception annuelle presque printanière de l’Union bourbonnaise jusqu’à sa fermeture. Les salons du Globe, boulevard de Strasbourg, ceux du palais d’Orléans, avenue du Maine, de l’hôtel Lutétia, boulevard Raspail, reçoivent, eux aussi, les Bourbonnais réunis.
La présidence, quant à elle, change tous les ans. A titre d’exemple, en 1899, c’est Jules Gacon, député et président du Conseil général qui officie, puis en 1901 Antoine Pizon, docteur ès-sciences, professeur agrégé d’histoire naturelle au lycée Janson-de-Sailly.
Un mensuel (parfois irrégulier), « Le Bourbonnais à Paris », maintient le lien entre chacun en leur apportant les informations sur les activités de l’association, des nouvelles et des monographies sur les villes du pays et des contes en patois. La parution commence le 25 septembre 1909 pour s’interrompre en juillet 1914. Elle reprend en janvier 1920 avant de s’interrompre à nouveau en 1939. La reprise de 1947 semble avoir tenu jusqu’en 1957. L’impression se fait à Montluçon.
Une nouveauté en août 1912 est la constitution de la « Fourmi bourbonnaise » qui opère un prélèvement sur les appointements des adhérents pour leur donner le goût de l’épargne. L’association donne aussi un coup de main dans la recherche d’emploi des nouveaux montés à Paris.
Le samedi 5 février 1938, jour particulier du cinquantenaire, rassemble 170 convives dans les salons de l’hôtel Lutétia dès 20h 30. Il leur en coûte 50 francs pour participer au banquet et au bal (12 francs pour ce dernier seulement). La présidence d’honneur est offerte à Adrien Siramy, avocat général à la cour de cassation. Il est bien entouré par monsieur Gabriel Chamoreau, président de la société, et Madame, Abel Faure et V. Renaud présidents honoraires de la société, messieurs Durcis et Vaudelin vice-présidents de l’U. B., monsieur Message, président de l’Union bourbonnaise de Boulogne-Billancourt et Madame, Jean Vincent, vice-président des Montluçonnais de Paris, messieurs Riboulet, président des Enfants du Bourbonnais et Robin, président honoraire, Desnoux, vice-président des fêtes, Alphonse Loyau, conseiller municipal de Paris 20e et rédacteur à l’Humanité, Albert Gautret, avocat à la cour d’appel. Antonin Péronnet, 83 ans, dernier survivant des membres fondateurs, fait un récit original des débuts de la société qui lui vaut des applaudissements nourris. Les frères Guillemin, maîtres sonneurs, animent la soirée qui, de danses en farandoles, se poursuit jusqu’à 5h 30. Une tombola assure un supplément de recettes pour la caisse de secours.
Nos contemporains Bourbonnais de Paris ont repris le flambeau de l’Union bourbonnaise avec l’association DAGE (de l’Allier aux grandes écoles).
Louis Delallier
*Le café-glacier Corraza n’est pas n’importe quel établissement. Il occupe les arcades 7 à 12 de la galerie Montpensier au Palais-Royal à partir du 4 juillet 1787. Le club des Jacobins en fait son quartier général et Napoléon le fréquentera. Il ferme en 1914.
** Quelques autres membres repérés au fil des articles : Delan, percepteur à Taverny puis à Pantin - Labonde, compositeur de musique - Pinguet - E. Ligier - Barbier, conseiller d’arrondissement - Chaumat avocat à la cour d’appel, maire d’Hérisson - Belleville - Garnier - Durand - Héraud - Lacombe - Chaumel - Docteur Terrier - Jules Talon pharmacien à Paris - Victor Bouet -Maurice Espargillières - Charvereau - Docteur Beylat - Barnichon - Servant - A. Voisin - Lénard - Robier - Vaudelin - Maurice Marché.