Il se nomme Antoine Vouyoux, natif de Noyant-d’Allier, et prend ses fonctions de concierge au musée le 1er juillet 1910. Il a alors 48 ans et trouve là une nouvelle orientation professionnelle. Il était, en effet, cultivateur avant d’entrer à l’armée où il est nommé gendarme à cheval en mai 1887. En 1891, il vit à Hérisson avec son épouse Marie-Louise Bonnet (1869-1951). Un fils y naît, Georges, qui n’atteindra pas ses sept mois. À la fin de l’année, le couple s’installe ensuite à Lurcy-Lévis où naît Georgette en 1894. La carrière d’Antoine se poursuit à la brigade à cheval de Moulins à partir d’août 1901. Ce sera sa dernière affectation militaire.
La presse locale parle de lui en 1906. En février, il est victime d’un accident de cheval alors qu’il est en tournée avec son collègue Albert Saugère à Gennetines. L’animal, effrayé par un oiseau sorti brusquement d’une haie, fait un écart qui projette son cavalier à terre. De fortes contusions lui valent une semaine de repos prescrite par le médecin-major Rossignol.
En août, il se fait remarquer en maîtrisant courageusement un cheval emballé attelé à la voiture du boulanger Debarbate dans la rue du Pont-Ginguet qui bouscule la voiture de Mme Mizon, maraîchère à Yzeure, et se dirige vers un groupe d’une vingtaine d’écoliers sortant de l’église du Sacré-Cœur. Il reçoit, du ministre de l’Intérieur, une médaille de bronze qui s’ajoute à une mention honorable qui lui avait été attribuée en mai 1900 pour avoir, à Lurcy-Lévis, « exposé sa vie en arrêtant un individu armé d’un compas dont il menaçait les passants ». »
C’est en juin 1910 que le conseil municipal valide son recrutement en qualité de concierge du musée nouvellement inauguré. Il quitte donc son emploi chez maître Sabatier, notaire à Moulins.
Presque un an après, le 27 mai, le même conseil doit se prononcer sur la demande qu’il a formulée. Il souhaite obtenir une indemnité pour la nourriture du chien dont il a fait son compagnon de garde. Un petit débat s’ensuit entre les élus au cours duquel M. Charlet s’insurge contre cette dépense inutile. Pour lui, il ne s’agit que d’un roquet qui ne peut pas être considéré comme un chien de garde ; il ajoute que cet animal gros comme un chat n’engloutira quand même pas douze livres de pain par jour comme un molosse. Il craint également que M. Vouyoux ne réclame pour lui ensuite. M. Béraud, maire, affirme que c’est un chien très intelligent qui aboie au moindre bruit et que M. Bertrand, le conservateur, est convaincu de son efficacité pour garder les collections. Malgré l’opposition de M. Charlet qui rétorque ironiquement qu’il ne lui manque plus que la parole, une indemnité de 50 francs (179 euros) prélevée sur les intérêts du legs Mantin est accordée à Antoine Vouyoux.
Le concierge assisté obtient une médaille de bronze attribuée par la société française d’archéologie à l’occasion du congrès archéologique à Moulins en juillet 1913 aux côtés de nombreuses autres récipiendaires architectes, chanoine, avoué, professeurs, autre gardien de musée, etc. Il sera remplacé pour cause de retraite par Antoine Tourreau, ancien charron, mutilé de guerre et pensionné à 80%, lequel est titularisé dans son poste en juillet 1928.
Louis Delallier
*Le musée nouveau est ouvert le 5 juin 1910, cinq ans après le legs de Louis Mantin. Son testament stipule qu’il cède sa maison et ses collections à la ville de Moulins aux conditions qu’elle les rassemble dans le pavillon Anne-de-Beaujeu avec les collections départementales conservées dans les locaux palais de justice, et relie sa maison audit pavillon par une galerie dont il donne les fonds de la construction.
La présence d’un musée à Moulins remonte à 1795 avec la nomination de Claude-Henri Dufour (1766-1845) comme conservateur des objets d’art provenant des confiscations révolutionnaires. En mai 1842, le conseil municipal crée un musée dans les salles de l’hôtel de ville à partir des toiles qui lui appartenaient au moment de la Révolution auxquelles s’ajoutent des dons et achats. Parallèlement, la Société d’émulation du Bourbonnais, fondée en 1845, rassemble des objets dont le produit de fouilles archéologiques qui vont constituer le musée départemental cité plus haut.
**Le conseil municipal du samedi 21 mai 1910 vote le règlement du musée d’art et d’archéologie moulinois, lequel est placé sous la direction du conservateur nommé par le préfet sur proposition du maire. Un concierge est préposé à la garde et à la surveillance du musée et de la maison Mantin aux appointements de 600 francs (2 686 euros) par an. Il est logé dans la maison Mantin (partie autrefois réservée à la domesticité). Il est responsable des objets confiés à sa surveillance et à sa garde et responsable des personnes qui entrent au musée ou en sortent. Les jours de visite, il devra se tenir dans le vestibule du pavillon Anne-de-Beaujeu. Ces jours-là, deux ou trois gardiens placés sous ses ordres lui seront adjoints, rémunérés 0,30 franc de l’heure. Interdiction leur est faite de dormir, lire ou se livrer à un quelconque travail pouvant les distraire de leur surveillance. Ils porteront une casquette indiquant leur qualité ornée des armes de la ville de Moulins et devront montrer la plus grande urbanité avec les visiteurs. Il leur est interdit d’accompagner les visiteurs dans les salles pour leur fournir des explications qui figurent dans le catalogue ou sur les cartels. Mais, ils ne devront laisser personne seul dans la maison Mantin.
Entrée à un franc ou 0,50 franc par personne pour les groupes - Gratuité des visites dimanche, jeudi et les jours de fêtes légales - ouverture du 1er avril au 30 septembre de midi à 17 heures - du 1er octobre au 31 mars de midi à 14h.. Les élèves et les artistes seront reçus sur demande à présenter au maire.