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Le grenier de mon Moulins

Histoire de Moulins (Allier) et anecdotes anciennes

De l'utilité et des dangers du tramway moulinois

Publié le 23 Mars 2025 par Louisdelallier

De l'utilité et des dangers du tramway moulinois

Pour faciliter leurs déplacements, les ouvrières et ouvriers de l’atelier de chargement* peuvent emprunter un mode de transport unique à Moulins et qui leur est réservé. Le tramway de l’usine part du carrefour de la rue des Garceaux et passe sur le trottoir gauche de la route de Lyon. Il franchit le passage à niveau 292 commun à la ligne Paris-Orléans de Montluçon et à la ligne SE (tacot) de Cosne. Un système de sécurité est prévu pour le franchissement de ce passage à niveau dont une cloche électrique qui annonce son arrivée. Dix à douze navettes quotidiennes sont assurées de jour comme de nuit aux heures de début et de fin du service du personnel. L’exploitation en est assurée par l’entrepreneur François Mercier. Le matériel est prélevé sur celui du tacot car la voie étroite, dite métrique, a le même écartement.

Les travaux qui ont commencé à la mi-avril 1916 sont bien avancés un mois plus tard. Jean Sèque dans son journal des années de guerre parle d’une installation archi-coûteuse qui détruit tout sur son passage et ne servira à rien pour l‘avenir. Le jeudi 18 mai, bien que la voie ne soit pas complétement achevée, l’entrée en fonctionnement du tramway attire de très nombreux curieux au passage à niveau de la route de Lyon pour assister au retour des employés à 18 heures. L’entrée en service effective a lieu le 6 juillet suivant.

Les adultes ne sont pas les seuls à s’intéresser à ce train urbain extraordinaire à Moulins. Les très jeunes habitants du quartier et de ses environs s’en emparent comme nouveau terrain de jeu au mépris du danger bien réel. La mode se répand tellement vite que le Courrier de l’Allier du 20 mai 1916 publie un avertissement qui leur est destiné. Grimper sur la balustrade pendant la marche et y épater la galerie avec des cabrioles insensées constituent un amusement des plus risqués. Deux jours plus tôt, un gamin s’est fracturé une jambe. Un deuxième tombe au milieu de la voie et échappe au pire en restant immobile jusqu’à la fin du passage des wagons. Il est instamment rappelé aux parents de veiller sur leur descendance.

Un an plus tard, le 26 mai vers 16h 30, Georges Bernier, 7 ans, fils d’un employé des chemins de fer, n’aura pas de chance. Venu de la rue Berlioz aux Bataillots tout proches pour profiter de cette nouvelle attraction, il tente de monter sur l’un des marchepieds et glisse sous les roues du tramway qui lui brisent les deux jambes. L’accident se déroule en face de la fabrique de pipes de M. Perrin, rue de Lyon. L’enfant est transporté à l’hôpital Saint-Joseph où l’amputation de sa jambe droite s’impose. Cette pénible opération ne lui permet pas de survivre. Il succombe le 28 mai à 6 heures pour avoir voulu jouer comme les autres. Cette vie perdue aura peut-être ét un coup de semonce salutaire car la presse ne signalera pas d'autres accidents.

L’armistice de novembre entraînant la réduction des activités de l’atelier, le tramway ne circule plus à partir du 1er avril 1919. La voie est démontée l’été suivant.

 

Louis Delallier

 

*L’agglomération de Moulins est choisie pour l’implantation d’un atelier de chargement d’obus car occupant une position ferroviaire stratégique suffisamment éloignée du front. Ce sera à côté du parc d’artillerie (aménagé en 1876 au lieu-dit La Mothe) au sud-est de Moulins sur la commune d’Yzeure, rue des Epoux-Contoux. L’entrepreneur François Mercier, en association avec l’entreprise Col de Moulins, est chargé des travaux de construction pour lesquels des prisonniers allemands sont réquisitionnés. L’atelier est ouvert le 22 février 1916. Il occupe 52 hectares et emploie 8 348 personnes civiles et militaires (Français, Italiens, Nord-Africains et Indochinois) dont 1 577 femmes. Une équipe travaille de jour et une autre de nuit dans des conditions difficiles accentuées par les émanations des produits explosifs et de vernis notamment. Plus de 50 000 obus sont chargés chaque jour.

L’horaire de travail de 6 heures à 17 heures pour l’équipe de jour et de 17 heures à 3 heures pour l’équipe de nuit rend difficile la garde des enfants à l’atelier. Une crèche est aménagée dans les locaux voisins de l’usine électrique dont la guerre a stoppé le fonctionnement. On voit encore la cheminée et le bâtiment de l’usine où s’est installée par la suite la parfumerie « Jardins de France » aujourd’hui fermée.

Voir mes articles au sujet de l'explosion de février 1918, autres accidents et revue au profit de la crèche-garderie.

Plan actuel

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