En 1942, Frédéric Klinghammer, horloger, professeur à l’école pratique de Moulins, est aussi en charge de l’entretien de Jacquemart. Monsieur Klinghammer n’est pas le premier venu. C’est un ancien de la maison Ungerer de Strasbourg, fameuse horlogerie fondée en 1858 par les frères Ungerer qui ont succédé aux Schwilgué père et fils. Trois générations d’Ungerer ont entretenu la troisième et actuelle horloge astronomique de la cathédrale de Strasbourg.
Frédéric Klinghammer et Jacquemart se sont peut-être rencontrés au cours de l’été 1932 quand les automates moulinois ont été transportés à Strasbourg chez Ungerer pour réparation. Il en a réglé les rouages au cours de l'année 1933.
On sait de lui qu’il a conçu et monté cette même année le mécanisme de l’horloge astronomique de la cathédrale de Messine tandis que Théodore Ungerer, son patron se chargeait des parties artistiques et des automates. De ce temps passé en Sicile, il rapporte que la population leur a réservé un excellent accueil et que l’évêque les a invités à sa table. Il faut dire que leur remarquable travail de plus de sept mois méritait bien un repas épiscopal.
Cette horloge est la plus grande au monde. Elle occupe deux faces du clocher. Le haut des différents sujets du mécanisme se trouve à 45 mètres du sol. Le côté sud tourné vers la basilique comporte les indications astronomiques et chronologiques avec le calendrier perpétuel, le planétaire et la sphère lunaire. La face principale à l’ouest regroupe l’ensemble des automates dans une suite de cinq baies superposées où l’on peut découvrir de bas en haut : les jours de la semaine, la mort et les quatre âges de la vie, la colombe et l’église votive de Messine, quatre scènes bibliques qui varient à travers l’année, la Madonna della Lettera.
Le tout est surmonté de quatre grands automates :
le coq qui bat des ailes et chante,
deux statues féminines à ses côtés représentant Dina et Clarenza héroïnes qui ont sauvé la ville de Messine assiégée par Charles d’Anjou en 1282,
au-dessus des deux statues, un lion énorme se dresse sur ses pattes de derrière, emblème de la province de Messine. Il rugit après avoir agité un fanion qu’il tient dans ses griffes.
D’après Monsieur Klinghammer, les figurations mobiles sont des créations artistiques, le système lunaire, le planétaire, le calendrier sont l’œuvre d’un penseur, d’un mathématicien et d’un astronome et le plan général est l’œuvre d’un poète et d’un philosophe.
A Moulins, en plus de son travail de professeur et d’entretien de Jacquemart, il prend la succession de Georges Sales comme horloger bijoutier au n° 58 de la place d’Allier. Dans les années 1970, il est installé au Maroc. À cette époque, il termine la construction du comput qui porte son nom. Ce mécanisme, sorte de modèle réduit du comput ecclésiastique se trouvant sur l’horloge astronomique de la cathédrale de Strasbourg, permet notamment de déterminer la date de Pâques dans le calendrier grégorien.Ce comput a été restauré en en 2006 et 2007 par Joseph Flores qui a raconté son travail dans un livre, livre critiqué car non scientifique et laissant apparaître de nombreuses lacunes.
Monsieur Klinghammer a vécu de 1908 à 2006, soit 98 ans. Le temps n’a pas été compté à ce spécialiste de l’horlogerie !
Louis Delallier