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Le grenier de mon Moulins

Histoire de Moulins (Allier) et anecdotes anciennes

Une belle meunière et deux farinières à Moulins

Publié le 13 Juin 2021 par Louisdelallier in Fêtes

Le grand salon de l’hôtel de ville n’a jamais reçu autant de jeunes filles en même temps qu’en ce lundi 8 juin 1925. Elles sont plus de 100 à avoir répondu à l’invitation du comité des fêtes moulinois pour tenter d’être élue belle meunière ou farinière. Il est 20h 30 quand le président du comité, Léon Loizel (également brasseur à la Madeleine), ouvre cette séance très particulière. Pour planter le décor, monsieur Planche rappelle qu’un sire de Bourbon se serait épris de la belle meunière du moulin Bréchimbault et aurait songé à faire bâtir un pavillon pour leurs rencontres, d'où la fondation de Moulins. C’est cette légende que l’association des AGMG (Association générale des mutilés de guerre) mettra à l’honneur au cours de sa fête du 14 juin.

Il faudra trois tours de scrutin aux électrices (seules les femmes sont appelées à voter) pour parvenir à choisir le trio. Les 95 votes du premier tour se répartissent sur trop de demoiselles pour donner une majorité absolue à l’une d’elles :

Mlle Dhier, 18 voix - Germaine Braud, 14 - Anna Lobriot, 11 - Renée Lapandrie, 7 - Marie-Louise Pontet, 6 - Yvonne Harquet, 5 - Marie Paturet, 4 – Mlle Fradet 4 – Mlle Maisonade, 4, etc.

Le 2e tour se joue entre les meilleurs scores du 1er. Il donne une nette victoire à Germaine Braud avec 64 voix. La deuxième, Anna Lobriot n’en obtient que 14. Puis viennent Mlles Dhier (8), Fradet (5), Harquet (3) et Paturet (3).

Il est déjà 22h 30 et un 3e tour se profile à l’annonce du refus de Germaine Braud d’endosser le titre pour raisons personnelles. Enfin, Anna Lobriot, employée à la manufacture de chaussures, est élue belle meunière grâce à ses 45 voix, Yvonne Harquet, couturière de 17 ans (24 suffrages) et Marie Paturet, 23 ans, employée au palais du vêtement (10 suffrages) seront ses deux farinières. La démission, très peu de temps après, de Marie Paturet demande une petit ajustement en la personne d’Hélène Tariant, 16 ans, couturière chez Belin qui avait obtenu des voix également.

Ces trois jeunes personnes ont moins d’une semaine pour se préparer au grand jour qui les attend costumées par la maison Lemesle de la rue d’Allier et coiffées de chapeaux par « Au Sans Pareil » de la rue de la Flèche. 

Et quel jour ! Un moulin*, cadeau du président de la République de Montmartre**, pas moins, arrivé de nuit à la gare aux bateaux à la Madeleine, est transporté à l’arrière d’une Peugeot pilotée par Charles Coutelard, garagiste, où la belle meunière et ses farinières ont pris place. Le cortège arrive sur la place du théâtre par la rue Bréchimbault naturellement. Jules Berny et Joanny Durand, sculpteur, représentent leur président de la République montmartrois. De réceptions en discours et remise de bijoux par les maisons moulinoises Sales, Iaman et Schmit, elles sont conduites dans la cour du Petit Lycée (Banville) agréablement ombragée après un arrêt sur la place du théâtre où se trouvait le moulin Bréchimbault.

Pour le plaisir de très nombreux spectateurs, l’AGMG a réuni des grands noms du spectacle comme le jeune haltérophile et catcheur Charles Rigoulot***, la cantatrice Mlle Mireille, autre déléguée de la République de Montmartre, le comique imitateur Stephen Weber de l’Olympia, des vedettes locales que sont les escrimeurs Vincent, Leca, Batissier et Vivier, des danseurs russes, le tout dans une ambiance musicale assurée par monsieur Grignon au piano et par la Lyre moulinoise. La belle meunière et les deux farinières ont tenu leur rôle avec sérieux et entrain dit-on, sans faillir malgré la longueur et l’intensité des festivités.

 

Louis Delallier

 

*création moulinoise de Paul Herblay (voir mon article à son sujet)

**La république de Montmartre, fondée en mai 1921 par les peintres, illustrateurs, affichistes Francisque Poulbot, Adolphe Willette, Jean-Louis Forain, Maurice Neumont et Joë Bridge est toujours active malgré ses 100 ans révolus. Basée sur le bénévolat de ses membres qui peuvent être nommés en son sein députés, consuls, ministres, ambassadeurs, elle est au service de l’enfance défavorisée et s’appuie sur la solidarité entre artistes et gens de bien, tout en préservant la tradition montmartroise frondeuse et humaine. Faire le bien dans la joie ! est sa devise.

***dont la mère est née à Tréteau

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