« Moulins, le 19 novembre 1914
Chers parents
J’ai reçu votre lettre qui ma fait bien plaisir de vous savoir en bonne santé tant qu’à moi je me porte bien ma blessure va bien je vous envoie ma photographie vous voyez que j’ai bonne mine j’en envoie une à Angéline
Je finis ma carte en vous embrassant de tout mon cœur votre fils Maupu Julien »
« Moulins le 25 novembre 1914
Chers parents
Je répond à votre lettre qui ma fait bien plaisir de vous savoir en bonne santé tant qu’à moi je me porte bien ma blessure est complétement cicatrisée je ne pense pas qu’il se reforme des abcès à présent, je boite encore un peu, j’irai sans doute à Yzeure d’ici peu je n’en sait encore rien je vous l’écrirai je finis ma carte en vous embrassant de tout cœur
Votre fils Maupu Julien »
Julien envoie ces deux cartes postales représentant chacune un groupe de militaires et d’infirmières photographiés dans le parc d’une propriété moulinoise.
Il a 25 ans. Sa fiche militaire le décrit avec force détails, et sans concession dans la partie « renseignements physionomiques complémentaires » : « lèvres épaisses, bouche petite, menton saillant, oreilles bien ourlées, sourcils clairsemés, yeux enfoncés ». Il est brun aux yeux bleu clair et mesure 1m 64. On apprend aussi qu’il a le front vertical (inclinaison), moyen (hauteur), grand (largeur), le nez cave (dos), relevé (base), petit (hauteur), grand (saillie) et grand (largeur). Son degré d’instruction est de 3 (instruction primaire plus développée).
Mobilisé le 2 août 1914, il est blessé dès le 6 septembre. Sa sérieuse atteinte (section des muscles de la cuisse) lui vaudra une affectation dans les services auxiliaires par des commissions de réforme successives et, par conséquent, son éloignement des champs de bataille.
Originaire de Saint-Prest en Eure-et-Loir, il est cultivateur comme ses parents, Sosthène et Louise. Il regagne sa région natale une fois la guerre terminée. Il épouse Henriette en octobre 1922 à Jouy où il s’installe comme aide-cultivateur chez ses beaux-parents. Il aura deux fils Henri et Roland.
A nouveau mobilisé le 25 août 1939 (il a 48 ans), il est heureusement renvoyé dans ses foyers le 18 novembre. Julien décède à Jouy le 31 décembre 1960.
Louis Delallier
* Pour faire face à l’afflux de soldats blessés, plusieurs hôpitaux auxiliaires ou temporaires sont ouverts grâce à la réquisition des bâtiments comme le lycée de jeunes filles (collège Anne-de-Beaujeu actuel), l’école normale d’institutrices rue Pape-Carpantier, l’école primaire supérieure de garçons de la rue Jean-Jacques Rousseau, le pensionnat Notre-Dame rue du Lycée, le noviciat des frères au 87 rue de Paris (face au cimetière). À Yzeure, le château de Bellevue, l’actuel lycée Jean-Monnet, le couvent de la Visitation et l’actuel hôpital spécialisé (anciennement asile Sainte-Catherine) sont également transformés pour l’accueil et les soins des soldats.