Les choses se présentent mal pour Louis Deschaume et Marie Touraud en ce vendredi 15 avril 1898 après-midi. Tout juste arrivés de Buxières-les-Mines par le train accompagnés de leurs parents respectifs, ils se hâtent vers la mairie de Moulins. En effet, ils sont pressés par le temps. Des invités et un repas de noces les attendent le lendemain dans leur village natal, jour théorique de leur mariage.
Ce qui les amène à Moulins est le résultat de la décision du maire de Buxières, Jean-François Devillard. Il vient de refuser de les marier malgré la publication, dans la commune, de la promesse de mariage en bonne et due forme. La raison, un peu tardivement exprimée, en est qu’aucun des deux jeunes gens n’y vit depuis au moins six mois, information pourtant connue du service de l’état civil buxièrois lors de leur demande. Monsieur habite Bussières-et-Pruns dans le Puy-de-Dôme et Mademoiselle rue d’Allier à Moulins. Pour éviter la nullité de l’acte, il leur est suggéré d’aller se marier à Moulins.
Voici donc les deux familles devant l’employé de l’état civil moulinois, mais à une heure trop tardive, car ce dernier a déjà enregistré les trois mariages prévus le lendemain, samedi 16. Il est par conséquent impossible d’effectuer un mariage le 15 dont l’acte serait inscrit dans le registre après ceux du 16…
Face à ce qui devait s’approcher de la détresse, l’employé compatissant obtient l’autorisation de procéder à un mariage après minuit pour le dater du 16. À minuit 15, les grilles de l’hôtel de ville s’ouvrent pour faire entrer les futurs mariés, les quatre parents et les quatre témoins de dernière minute. Le bureau de police se trouvant à la mairie, des passants attardés dans les rues croient qu’il s’agit d’un « coup de filet » ...
Marie, 24 ans, domestique, et Louis, 29 ans, cultivateur, sont alors unis en toute légalité par Henri Péronneau, premier adjoint, en présence de leurs pères et mères, d’Alain Bercot, 32 ans, Michel Fougère, 22 ans, Joseph Nicolas, 31 ans, employés de commerce, et d’Arthur Leturcq, 53 ans, négociant, tous de Moulins et amis des époux.
Les jeunes mariés et leur suite ont encore largement le temps d’attraper dans une relative sérénité le tacot de 6h 30 pour Buxières où aura lieu la cérémonie religieuse et la fête.
L’acte officiel figure dans les registres municipaux à la date du 16 avril 1898, à 16 heures, soit après les trois mariages du jour célébrés à 10h 30, 15 heures et 16 heures.
Louis Delallier