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Le grenier de mon Moulins

Histoire de Moulins (Allier) et anecdotes anciennes

Un autre Louis Mantin moulinois

Publié le 1 Décembre 2024 par Louisdelallier in Portraits

Louis Mantin et Elisabeth Fumoux, acte de mariage 6 janvier 1883 à Moulins

Louis Mantin et Elisabeth Fumoux, acte de mariage 6 janvier 1883 à Moulins

Louis Mantin de la fameuse maison n’est pas le seul Louis Mantin à mourir au cours du 4e trimestre 1905. Un autre Louis Mantin s’ajoute à la liste des nécrologies deux mois et dix jours après. Celui-ci n’est pas avocat, ni haut-fonctionnaire même s’il fut surnommé le préfet de la rue de Bourgogne. Il ne lègue pas non plus à la ville qui l’a vu naître une étonnante demeure qu’il a fait bâtir à deux pas de la cathédrale ainsi que ses riches collections. Celui-ci, après avoir été ouvrier dans la chapellerie, est débitant de tabac et cabaretier, rue de Bourgogne. Il est aussi conseiller municipal depuis mai 1892, élu sur la liste du républicain Joseph Sorrel. Il laisse une veuve, Élisabeth, couturière.

Au moment de son décès, le Courrier de l’Allier brosse un court portrait de sa personne en des termes mi-figue mi-raisin : Son entrée au conseil municipal, une des premières concessions faites à la... pleine démocratie - Au fond un brave homme, très aimé de tout le monde, un peu fort en gueule, plein de son importance dès qu’il fut devenu quelque chose - Pas un édile d’un maintien plus grave aux revues du 14-Juillet ou aux réunions municipales - Répondait avec condescendance au surnom jovial de Bicot* - A réclamé pendant des années le lavoir du pont de Bardon dont la création vient enfin d’être décidée - Les lavandières lui auront une reconnaissance attendrie.

Le rédacteur en chef du Radical de l’Allier réagit peu de temps après en soulignant le fiel des termes employés et l’offense faite à la mémoire du disparu. Les deux rédactions journalistiques sont manifestement à couteaux tirés et se servent de chaque occasion pour régler leurs comptes politiques. Le Courrier de l’Allier répond que ce bon vivant de Louis Mantin était bien un fort en gueule dont les tirades faisaient la joie de son quartier et un péroreur intarissable. Il fait même confirmer ses propos par un des amis de « Bicot ».

Les obsèques civiles ont lieu le dimanche 17 décembre 1905 et sont conduites par son frère Antoine et plusieurs membres de la famille. Les cordons du poêle** sont tenus par messieurs Sorrel, maire, Galland représentant la société Prévoyants de l’Avenir, Champagnat, secrétaire de la Libre-Pensée, et Noël, membre de la société de Secours mutuels des ouvriers. Dans ce cortège impressionnant (on dénombre plus de 1 800 personnes), on remarque le conseil municipal presque au complet, M.  Nectoux, secrétaire général de la préfecture, M. de la Bourdonnays, secrétaire particulier du préfet, quantité de membres des administrations et des écoles laïques, des délégués de la Libre-Pensée et des comités républicains du département. Messieurs Ville, sénateur, Péronneau, député, et Briens, préfet, n’ont pu s’y joindre car retenus à Paris.

Les discours prononcés au cimetière sont autant de preuves de la grande estime dans laquelle les concitoyens de Louis Mantin le tenaient. C’était un parfait honnête homme avec une instruction solide, un négociant modèle, un démocrate et un philanthrope. Cet excellent citoyen au jugement sûr fut élu au conseil municipal pour représenter la classe ouvrière dont il connaissait bien le mérite et les besoins. Son amour de la justice et du bien public l’ont conduit à s’engager sans compter. Il est également à l’origine des fêtes de son quartier considérées comme les plus animées et les plus belles de la ville. La longue maladie qui l’a emporté l’avait empêché de se rendre à Bourbriac dans les Côtes-d’Armor où il venait d’être nommé receveur-buraliste, poste qui lui aurait assuré un revenu pour ses vieux jours. Certains se demandent si cet éloignement annoncé n’aurait pas précipité sa fin.

Sur sa tombe ont également été déposées des couronnes des habitants du quartier de Bourgogne et de la compagnie des sapeurs-pompiers.

 

Louis Delallier

 

*d’arbicot : arabe. Aucune explication n’est donnée à ce surnom considéré comme banal à cette époque.

**les cordons du poêle étaient les cordons attachés au drap funéraire qui recouvrait le cercueil lors d'un enterrement. Ces cordons étaient tenus par les proches du défunt lors de la marche funèbre. C'était en quelque sorte un geste symbolique

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