Jean-Baptiste Ciret, natif de Verneuil-en-Bourbonnais, vit rue des Potiers à Moulins au moment de son mariage avec Catherine Château en septembre 1887. Il est photographe, elle est couturière.
Mais Jean-Baptiste a d’autres ambitions professionnelles qui le conduisent à solliciter la recommandation du député moulinois Pierre Ville pour entrer au Mobilier national à Paris. La démarche semble avoir porté ses fruits car en mars 1891 le jeune couple est domicilié 14 avenue Montaigne dans le 8e arrondissement (à environ huit cents mètres du Garde-Meubles comme on le nommait encore parfois, situé 103 quai d’Orsay). C’est là que naît Jeanne le 31 mars 1894. Sur l’acte de naissance, Jean-Baptiste est toujours photographe.
En 1895 et 1896, la petite famille réside au 99 quai d’Orsay et ce sans doute jusque dans le courant de l’année 1898, moment de l’entrée en fonction de Jean-Baptiste à l’Élysée en qualité de concierge. Félix Faure est alors président de la République. A cette nouvelle et prestigieuse adresse du 55 rue du Faubourg Saint-Honoré, Catherine, qui exerce encore comme couturière, donne naissance à Albert le 6 novembre qui, malheureusement, meurt à l’hôpital Beaujon trois jours plus tard.
Une nouvelle affectation est octroyée à Jean-Baptiste Ciret qu’on retrouve concierge du château de Compiègne* dès le début de l’année 1899. Il n’aura donc pas eu à prendre en charge l’agitation consécutive au décès soudain du président Faure le 16 février. En revanche, il sera au premier plan pour la visite officielle de l’empereur et l’impératrice de Russie à la fin du mois de septembre 1901. Un bébé Ciret, René Maurice, est né au château le 18 août précédent.
Et la vie de châtelains se prolonge pour les Ciret accompagnés de leurs deux jeunes enfants grâce à un emploi au château de Fontainebleau cette fois. Ils y vivent en 1903 au moins. La carrière de Jean-Baptiste se poursuit à la ménagerie du muséum d’histoire naturelle dans le 5e arrondissement où il occupe les fonctions de gardien. Catherine décède le 9 avril 1916 à l’hôpital Laënnec, 42 rue de Sèvres. Son acte de décès mentionne le 99 quai d’Orsay comme domicile.
Pendant son séjour à la conciergerie élyséenne, peut-être Jean-Baptiste Ciret a-t-il reçu la visite d’importuns de toute sorte. Les statistiques, depuis le printemps 1873 (présidence du maréchal de Mac-Mahon), montrent en effet que deux-cent-cinquante-deux personnes dérangées s’y sont présentées, dont une seule femme. Cela va du génie qui aurait résolu le problème de la quadrature du cercle, à l’employé de la compagnie des chemins de fer du Nord, père de cinq enfants, venu de Lille porteur d’une lettre lui annonçant qu’il vient d’être nommé président de la République, en passant par celui qui savait comment terminer les travaux du canal de Panama, entre autres énergumènes. Chacun est emmené à l’infirmerie où l’on statue sur son état. Aucun ne se montre agressif. Beaucoup sont ensuite dirigés vers l’un des asiles des environs.
Louis Delallier
*La Jeune Garde du 13 avril 1893 annonce la permutation des concierges de l’Élysée et du château de Compiègne. Était-ce une habitude dont a bénéficié notre Moulinois ?